Le jour du 15 janvier 1944 marque, pour le réseau résistant d’Avon-Fontainebleau, une nouvelle vague d’arrestation importante après celle de 1943. Celle-ci fait suite à une dénonciation, mais nous n’avons pas de sources permettant de désigner quelqu’un.
À 9h15, à la mairie d’Avon (actuellement école Paul Mathéry), Paul Mathéry, secrétaire de mairie, est arrêté. Envoyé à la prison de Fontainebleau, puis au camp de Royallieu, il fut déporté à Mauthausen et mourut le 2 août 1944 au camp de Melk.
En milieu de matinée, vers 10h00, en ce 15 janvier 1944, les feldgendarmes (police militaire allemande) encerclent le Petit-Collège et interdisent toute entrée ou sortie.
Dans la cour le chef de la Gestapo de Melun, Wilhelm Korf, demande à un élève de le conduire au Père Jacques qui donne un cours de français aux élèves de 1ère. Le directeur du Petit Collège sort de la salle de cours à la demande de la Gestapo. Il est arrêté et conduit au premier étage. Quelques instants plus tard, un homme en civil entre dans cette même salle de 1ère et appelle « Dupré » (Jacques France Halpern). Deux hommes, également en civil, font irruption dans la salle de classe de M. Tranchant et appellent « Bonnel » (Hans-Helmut Michel). Au deuxième appel, il se lève, sans un mot, serre la main de ses camarades et sort. M. Dulac donne un cours de grec aux élèves de 4ème lorsque deux hommes entrent. L’un d’eux sort un papier et réclame « Sabatier » (Maurice Schlosser). Ce dernier était debout, interrogé par le professeur.
Les autres classes ne sont pas dérangées.
À 10h10, les arrestations du Père Jacques et des trois enfants juifs sont terminées.
À 11h00, la cloche sonne la fin des cours. Professeurs, élèves et personnel du Petit-Collège sont rassemblés dans la cour. W. Korf procède alors à l’appel en comparant les tickets d’alimentation et les cartes d’identité. Deux séminaristes réfractaires au Service de Travail Obligatoire en Allemagne sont aussi arrêtés.
L’appel s’interrompt un temps.
Les trois enfants apparaissent en haut du perron. Emmenés violemment par les soldats allemands, ils traversent la cour devant leurs camarades et quittent le Petit-Collège par la porte en fer qui se trouve 3 rue Père Jacques (à l’époque 3 rue de la Charité). Un véhicule les emporte à la prison de Melun.
Puis le Père Jacques apparaît à côté de la statue de sainte Thérèse de Lisieux, encadré de deux Allemands. Souriant, il regarde les enfants rassemblés et leur dit « Au revoir les enfants, continuez sans moi ». Arrivé à la porte, il se retourne et, du bout des doigts, leur envoie un signe d’encouragement avec un baiser.
À 12h15, l’appel est terminé, le Petit Collège va être évacué, les élèves renvoyés auprès de leur famille.
À 15h00, les scellés sont posés sur toutes les portes.
Peu après 12h, ce même jour, le professeur Lucien Weil est arrêté, avec sa mère, Irma, et sa sœur, Fernande, en leur domicile de Fontainebleau. Il retrouve les trois enfants juifs arrêtés peu de temps auparavant. Ensemble, ils sont emmenés au siège de la Gestapo à Melun, puis transférés à Drancy le 18 janvier.
Lucien, Irma et Fernande Weil, Jacques France Halpern, Maurice Schlosser et Hans-Helmut Michel sont déportés le 3 février 1944 par le convoi n°67 et arrivent à Auschwitz le 6 février. Ils sont assassinés dans une chambre à gaz dès leur arrivée.